« I’m every woman, it’s all in me »
Whitney Houston

Être une femme c’est d’abord avoir été une fille. Avoir été bercée de contes de fées mensongers et dangereux qui nous ont lancée dans une quête impossible et oh combien stupide : le prince charmant !

Une fois devenue adulte cela fait de nous une espèce d’hystérique impossible à satisfaire, bourreau de pauvres garçons qu’on assassine à coup d’exigences  de princesse dont la pire est celle-ci : » rends moi heureuse  ». Mission impossible bien sûr pour le pauvre homme de bonne volonté qui donne tout ce qu’il a, s’épuise à combler  le vide sidéral creusé par la quête du graal onirique et finalement le pauvre est abandonné sous un flot de reproches que la femme devrait s’adresser à elle-même :  » tu n’as pas su me combler  » (bien évidemment, pétasse, ton cœur est un gouffre, un trou noir pathologique !)

Ce n’est qu’après avoir décimé ces  braves  »princes charmants un peu trop normaux pour être aimés  » que la femme réfléchit enfin au vrai problème : primo le prince charmant est une invention sadique pour empêcher le peuple de trouver le bonheur et donc l’empêcher de s’épanouir et donc d’éventuellement se révolter contre les puissants. Deuzio on ne peut pas attendre de l’autre qu’il nous rende heureux, le bonheur se façonne en soi même, il faut en devenir capable, et alors seulement, on peut se nourrir de l’autre (sans pour autant aller jusqu’au cannibalisme bien entendu, bien que la chair humaine ait, paraît il, le goût de poulet) pour être encore plus heureux à deux.

Être une femme c’est, une fois qu’on n’est plus hystérique, savoir plus ou moins rester une femme tout en étant compagne, mère, femme de ménage, cuisinière, employée etc…

Ne pas se transformer en vieux sac en jogging à la mine grise errant dans les rayons d’Auchan en rêvant d’un autre destin. Ceci dit ils ont inventé le  » drive  », peut-être pour éviter ce spectacle navrant ?

Peut-être n’est-ce pas si mal finalement d’être comme moi une grande égoïste qui a continué de consacrer une partie déraisonnable  de son temps à ses amis et à ses passions, cela va peut-être me faire être reniée par mes enfants plus tard et être quittée par mon mari bientôt mais au moins j’aurais évité le syndrome du  jogging à la mine grise…


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Bref, être une femme c’est aussi avoir des hormones incontrôlables qui nous rendent folles la moitié du temps, et épuisée l’autre moitié. Donc invivables la totalité du temps. Et quand les hormones disparaissent c’est leur manque qui rend dingue. Et quand tout ça se calme et bien il est presque temps de mourir. D’où la question que je me pose : naît-on femme parce qu’on a un mauvais karma ?

Être femme serait une punition pour avoir été cannibale dans une vie antérieure ? (parce qu’une imbécile nous avait dit que ça avait le goût de poulet alors on a voulu essayer… Est-ce de ma faute si je suis curieuse et si j’aime le poulet ?)

Mais qui est le plus puni finalement ? La femme qui devient folle à cause de ses hormones ou l’homme qui subit ces humeurs à géométrie variable pendant des années ? (en tous cas je sais qui est le plus méritant).

Être une femme c’est pouvoir être tendre, romantique ou rude, chienne ou carrément une pure salope tout en restant gracieuse. Jamais vulgaire.

Être une femme c’est parler des heures avec ses copines, passer du léger au drame, du rire aux larmes en une fraction de seconde.

C’est pouvoir être la mascotte de ses amis gays et passer des nuits entières à faire la fête au milieu de tous ces hommes adorables et passer de bras en bras telle une chaste déesse.

Parler sexe avec eux, et deux secondes après politique, culture, philosopher encore et encore. Les quitter très tard alors qu’on bosse le lendemain. Être grisée de ce partage toujours si exaltant.

Être une femme c’est avoir l’impression d’être un homme lorsqu’elle est en compagnie de son meilleur ami gay, être son double, être son frère, refaire le monde des nuits entières à ses côtés, partager Venise, émus comme des amoureux qui s’ embrassent pour la première fois .

Et redevenir une femme à 100% avec sa meilleure amie, être une part d’elle même, sa sœur et s’enfuir avec elle sur un coup de tête à Vegas lors d’une soirée arrosée, alors que le voyage est prévu pour dans deux ans.  Avoir la tête qui flambe, plus aucune pensée raisonnable.

Être une femme c’est aimer follement, passionnément, tendrement.

Être une femme c’est aussi se prendre des mains aux fesses dans la rue, comme ça, sans prévenir et sans demande de consentement préalable. C’est devoir baisser les yeux et poursuivre son chemin malgré tout pour éviter de recevoir, après la main aux fesses, le poing dans la figure si on ose se rebeller contre cette agression odieuse. L’homme repart donc content de lui, fier et la main chaude de son viol, et la femme repart humiliée, souillée et n’oubliera jamais, je dis bien jamais cette agression qui est tout sauf anodine.

Ai-je besoin d’évoquer les crétins qui me sifflent quasi quotidiennement dans la rue quand j’ai le malheur de porter une robe ? Et le  » t’es bonne » qu’ils me jettent à la figure comme s’ils me crachaient dessus ?


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Bref, cela sera sûrement le sujet d’une étude prochaine qui s’intitulera  »pourquoi certains hommes sont ils des porcs ? ».

Être une femme c’est pouvoir pleurer en public sans être traitée de mauviette (pourquoi les hommes n’ont ils pas le droit de pleurer en public ?), pouvoir pleurer devant un film, son  enfant qui joue, un coucher de soleil, son repas qui crame et même avoir le luxe de pleurer pour rien.

Être une femme c’est la joie pétillante de mettre une petite robe, des talons et se sentir légère, se sentir  » femme  » et aimer ça. Mais c’est aussi aimer être en jean baskets si c’est ça notre kiffe.

C’est avoir l’immense privilège de pouvoir se maquiller et ainsi parer son visage de couleurs et de lumière. Se sentir comme une fleur au printemps.

Être capable de faire mille choses en même temps, et les faire bien.

Pouvoir s’occuper de ses enfants, du repas, écouter son mari raconter sa journée tout en écrivant un poème, sans que personne ne soit lésé. Avoir plusieurs tiroirs ouverts et fonctionnels en même temps dans sa tête.

Être une femme c’est aussi aller se révolter les seins nus devant ce macho de Poutine.

C’est apprendre à conduire dans un pays qui nous l’interdit sous prétexte qu’on est une femme.

C’est oser se battre et faire voter une loi pour le droit à l’avortement. Être une femme c’est être Simone Veil, qui avait plus de testicules que n’en auront jamais aucun de nos dirigeants.

Être une femme c’est pouvoir choisir de se comporter comme un homme parfois tout en ne renonçant pas à son identité féminine. En avoir dans le pantalon sans avoir besoin du fameux phallus (qui ne nous manque pas du tout monsieur Freud, on vit très bien sans,  rassurez-vous espèce de macho un peu trop célèbre).

Être une femme ça n’est surtout pas être une  » chienne de garde » militante qui déteste les hommes.

Être une femme c’est l’inestimable bonheur de porter la vie, et donner la vie. Et la modestie de reconnaître que l’homme en a fait la moitié.

Être une femme c’est regarder son enfant dormir et se dire que rien ne peut nous rendre plus heureuse que cette petite personne en devenir. Parler avec lui et s’extasier de sa vision du monde. Être en admiration devant sa pureté. Avoir envie qu’il nous dépasse, soit meilleur que nous, et tout faire pour l’y aider.

Être une femme c’est bien plus que tout cela, c’est difficile et merveilleux à la fois.

Une femme est un mystère, même et surtout pour elle même…

Une vie ne me suffira pas pour en faire le tour et c’est très bien ainsi…

Ambre Deveil