Chapitre 1

11 septembre 2001,  un séisme planétaire. Un jour qui se vit de pleurs et de cendres. C’est l’incompréhension. Quelque temps plus tard, la tragédie qui laisse le monde entier médusé ouvre la voie à la campagne énergique de lutte contre le terrorisme en Afghanistan. Une conquête qui dure puisque, aujourd’hui encore, les troupes étatsuniennes sont présentes sur le terrain afghan craquelé de toutes parts. Alohanews a décidé de consacrer un dossier à cette lutte en Afghanistan. Est-ce une guerre juste ? Est-ce que cette méthode s’est avérée efficace pour lutter contre le phénomène ? Avant de se plonger dans une analyse de terrain, ce premier chapitre relate la genèse de l’intervention en Afghanistan.

Avant les attentats du 11 septembre, le terrorisme était déjà présent dans les relations internationales. De Russie en passant par l’Algérie, ce phénomène s’est forgé une place importante dans la nouvelle ère du monde politique. Pourtant, c’est indéniablement en automne 2001 que le monde mesura la gravité de cette menace. Depuis ce jour, tout s’est relativement métamorphosé : des livres sur la tragédie abondent les bibliothèques comme « Le Nouveau Pearl Harbor » du professeur Griffin, le monde Occidental et le Moyen-Orient entrent dans une adversité encore plus accentuée avec une volonté américaine de restructuration de l’ordre mondial, le gouvernement étatsunien redéfinit sa politique étrangère et place le concept de sécurité ainsi que la lutte contre le terrorisme au centre de ses actions.

Le 11 septembre 2001 est un événement nouveau pour les États-Unis. C’est la première fois que les USA sont attaqués sur leur sol. Le 11 septembre, quatre avions de ligne sont détournés par des terroristes islamistes appartenant au groupuscule Al-Qaïda et deux des engins s’écrasent, passagers à bord, sur les tours jumelles du World Trade Center, à New York, et un autre sur le Pentagone. Le dernier est dévié de sa trajectoire initiale par les passagers et l’avion finit par s’écraser en Pennsylvanie. 3000 morts et disparus sont comptés aujourd’hui.

Du 11/09 à la guerre en l’Afghanistan

Aussitôt la catastrophe engendrée, le monde entier découvre l’identité du présumé responsable : Oussama Ben Laden. Cet ancien agent de la C.I.A devenu fondamentaliste musulman wahhabite œuvrait dans les années 80 pour les services secrets américains pour organiser la lutte armée des islamistes afghans contre les forces soviétiques. Depuis, après qu’une base militaire américaine ait été implantée en Arabie Saoudite, il jure de combattre les USA en créant un réseau terroriste du nom d’Al-Qaïda. Depuis 1991, Ben Laden livre une guerre sans merci aux forces américaines depuis des repaires dans les régions montagneuses de l’Afghanistan des talibans du Mollah Omar. 10 ans plus tard, c’est au cœur même des symboles de l’hyperpuissance mondiale tels que ce sont représentés les États-Unis que s’est attaqué le Saoudien.

La suite donnée aux attentats pèse lourd. Le 20 septembre 2001, devant le Congrès, le discours de George W. Bush laissait présager une riposte pour la défense des valeurs fondamentales que prônent les États-Unis : la liberté et la démocratie. En parlant des auteurs des crimes commis à l’encontre des USA, G. W. Bush déclara :

« Les Américains demandent : pourquoi ils nous haïssent ? Ils haïssent ce que l’on voit précisément ici, dans cette Chambre – un gouvernement démocratiquement élu. Leurs dirigeants sont autoproclamés. Ils haïssent nos libertés – notre liberté de culte, notre liberté d’expression, notre liberté de voter, de nous assembler et d’être en désaccords les uns avec les autres[1] ».

La réactivité du président ne s’est pas fait attendre puisqu’en moins d’un mois, les États-Unis, avec le soutien de la Grande-Bretagne, partent en Afghanistan dans le but de faire tomber le régime taliban en place depuis 1996 et de démembrer Al-Qaïda afin d’arrêter Ben Laden, l’ennemi public numéro 1. La lutte contre le terrorisme est approuvée par la communauté internationale au lendemain de la tragédie ancrée dans la mémoire collective…sans doute à tout jamais.

Le 19 septembre, le gouvernement taliban refuse l’extradition d’Oussama Ben Laden sans avoir des preuves de son implication. Le Conseil de Sécurité exige, à l’unanimité, la remise « immédiate et inconditionnelle » d’Oussama Ben Laden[2]. Suite à l’échec de l’extradition, les premières frappes américano-britanniques surgissent dans la nuit du 7 au 8 octobre 2001. Pour annoncer la couleur, plus d’une cinquantaine de missiles de croisière sont déployés. Trois jours suffisent aux forces engagées dans l’intervention de contrôler la zone aérienne afghane. Le 19 octobre, les États-Unis engagent les premières actions terrestres avec l’aide de l’Alliance du Nord, un mouvement de résistance afghan contre les talibans. Ces derniers guident les drones vers les repères des talibans. Une méthode efficace puisque les talibans prennent la fuite vers les régions montagneuses à la frontière pakistanaise. Le 26 octobre, Donald Rumsfeld, le secrétaire à la Défense des États-Unis, déclare que Ben Laden ne sera peut-être pas capturé, mais une instauration d’un nouveau régime en Afghanistan est envisagée.

Cette guerre éclair de 5 semaines débouchera, le 13 novembre 2001, à l’effondrement du régime taliban qui siégeait en Afghanistan. Par la suite, L’ONU aura la volonté de stabiliser l’avenir politique de l’Afghanistan puisque celui-ci se trouve désormais sans gouvernement. Le 14 novembre, l’ONU vote la Résolution 1386[3] affirmant envisager l’envoi d’une force internationale, la mise en place d’un gouvernement multiethnique ainsi que des élections dans les deux ans qui suivent.

Le 27 novembre, sous l’égide des Nations Unies, une conférence interafghane est organisée à Bonn, afin de résoudre la situation politique de l’Afghanistan. Le 4 décembre, un accord est érigé et un gouvernement intérimaire est mis en place à Kaboul, avec à sa tête le Pachtoun Hamid Karzaï.

En 2002, une Force Internationale d’Assistance et de Sécurité (FIAS) est déployée par l’ONU et confiée à l’OTAN. Cette alliance est composée de 41 États, dont la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et les États-Unis. Les buts onusiens étaient la sécurité et la reconstruction du peuple afghan. Empêcher que le territoire afghan ne devienne un refuge pour les terroristes faisait également partie des objectifs. Malgré l’instabilité profonde qui divise le pays dû aux multiplications des attentats talibans face à la présence de la FIAS, la corruption au sein du gouvernement et l’échec de capture d’Oussama Ben Laden et d’autres membres d’Al-Qaïda, l’OTAN déclare sa mission accomplie.

Un nouvel épisode vient basculer le déroulement de la situation : George Bush émet la volonté d’envahir l’Irak de Saddam Hussein. Les armes de destruction massive prétendument détenues par Saddam Hussein sont le socle de la légitimation de l’opération.

Le 16 mars 2003, le président Bush ainsi que les premiers ministres britannique, espagnol et portugais conviennent d’une intervention militaire conjointe contre l’Irak malgré l’opposition ferme de la Russie, de la France, de l’Allemagne et des Nations Unies.

Quelques semaines plus tard, l’armée coalisée entre à Bagdad afin de capturer Sadam Hussein et offrir la liberté au peuple irakien. Pourtant, l’Irak est dans le gouffre. Bagdad devient un terrain d’affrontements multiformes. Une guérilla urbaine débute par des résistants et des tensions interconfessionnelles. Ayant aperçu la complexité de la situation, Washington délaisse la situation en Afghanistan pour faire celle de l’Irak, son cheval de bataille.

Plus de dix ans plus tard, les éléments de réponse se profilent à l’horizon. La guerre d’Afghanistan n’est toujours pas terminée. Malgré la mort de Ben Laden, chef et membre d’Al-Qaïda, le terrorisme islamiste est au cœur des agendas politico-médiatiques, la guérilla urbaine est quotidienne à Bagdad et les talibans reprennent plus de 75 % du terrain afghan. L’intervention en Afghanistan n’était-elle qu’une riposte sauvage qui n’a pas pu atteindre ses ambitions ? Est-ce que l’intervention contre le terrorisme en Afghanistan était une guerre légalement justifiable ? Rendez-vous pris au prochain chapitre.

Imambajev Nikita

[1] George W. Bush, « Address to a Joint Session of Congress and the American People », White House Office of The Press Secretary, Washington, 20 septembre 2001.

[2] Chronologie de la crise afghane, le 07/01/2002, en ligne http://www.monde-diplomatique.fr/dossiers/chronoafghane/, dans Monde Diplomatique, consulté le 11/03/2013.

[3] Conseil de Sécurité, Résolution 1386, 2001.