Ce samedi 16 décembre a eu lieu sur TF1, chaine leader française, et en direct, s’il vous plaît, l’élection de Miss France 2018. Alors que cette année a été marquée par un réveil des associations féministes, ce concours apparaît plus désuet que jamais. Pire encore, le thème de cette année, à savoir la condition des femmes, a fait sourire bon nombre de personnes qui y voient juste l’hypocrisie d’un sexisme contourné.

Cette année encore, comme depuis 1920, le programme est identique : trente jeunes femmes défilent en costumes et bikini sous le regard de millions de téléspectateurs avisés. Petite révolution tout de même pour cette édition, puisqu’un changement « de taille » a été annoncé. Des critères de sélection plus souples, me direz-vous ? Une plus grande importance accordée à la personnalité ? A la culture ? Que nenni. Nicolas Fafiotte, habilleur des Miss depuis 2010 s’est battu « pour que les Miss puissent porter des robes courtes. », afin que « le public puisse voir les jambes des cinq finalistes. ». Si, si, vous avez bien lu. Comme si le traditionnel défilé en maillot de bain échancré n’était pas suffisant.

Le but de cet étalage médiatique : élire la plus belle femme de France. Mais sur quels critères exactement ? La taille minimale pour concourir est d’1m70 ; il faut avoir entre 18 et 26 ans et être née de sexe féminin. Passé cet âge, vous semblez sans doute trop flétries, mesdames. Miss France en devenir doit également être célibataire, histoire d’être disponible pour toutes les représentations qui l’attendent, ni veuve, ni divorcée. Évidemment, il est interdit de porter des piercings ainsi que des tatouages. Dois-je également préciser que pour être élue, vous ne pouvez pas avoir d’enfants ?

D’autres règles, non inscrites, mais prises tout de même en compte, sont déterminantes pour l’élection, comme par exemple, le poids. En effet, difficile de trouver une Miss dépassant la taille 38 et les courbes des candidates potentielles, comme le cite un magazine français, font plus dans l’anguleux que dans l’arrondi. En sachant qu’en moyenne, la femme française mesure 1m62 pour environ 63 kilos, on est donc loin d’une représentation caricaturale.

Les Français votent pour une femme comme on élirait un produit de supermarché. Miss France reléguée alors au rang de « femme-objet » ? La question ne semble pas si étrange puisque la femme élue se prêtera, lors de son mandat d’un an, à toutes sortes d’opérations de publicités et de marketing.

Autre détail caustique de la soirée, les Miss candidates doivent pouvoir se montrer « altruistes, tolérantes, optimistes et bienveillantes ». Une demande plutôt ironique lorsque l’on sait que le programme même repose sur une totale intolérance.

Ayant moi-même regardé ce concours hier soir, plusieurs questions me sont venues. Pourquoi, par exemple, n’existe-t-il pas une élection de Mister France en direct à 20h50 un samedi soir sur TF1 ? Pourquoi la chaîne la plus regardée de France ne diffuse-t-elle que les matchs de football masculins et les défilés féminins en bikini et robes courtes ?

Si Miss France est censée représenter « la plus belle femme de France », ce concours n’est-il pas purement subjectif ? La beauté française doit-elle obligatoirement mesurer 1m80, avoir des dents blanches parfaitement alignées et un ventre extrêmement plat ? Bien sûr que toutes ces candidates sont magnifiques, mais elles ne représentent toutes qu’un seul type de beauté. Et les autres ?

Dans un monde où des jeunes filles, jeunes femmes, femmes, souffrent terriblement du regard des autres, d’une part, mais entendent, d’autre part, qu’il faut pouvoir s’aimer et s’accepter tels que nous sommes, je me demande quelle est leur réaction devant ce type de programme puisqu’elles ne correspondent pas aux critères de beauté que la société nous inflige depuis des années ? Comment leur faire comprendre que cette image qu’on leur renvoie ne correspond en rien à la femme « lambda » ?

Cette année encore, et sans regret, il me sera impossible de concourir pour ce célèbre concours de beauté, étant donné que je mesure seulement 1m63 et que j’ai atteint l’âge apparemment critique de 26 ans. Pourtant, cette année encore, je profiterai, sans une once de culpabilité, de toutes ces merveilles gustatives qu’offrent les repas de fin d’année. Pas bouquet de roses rouges ni de tiare en diamants, certes, mais à moi les petits fours, la dinde farcie aux marrons, les huîtres et la bûche au chocolat.

Et, vous savez quoi ? Ça vaut clairement tous les défilés en bikini du monde !

Alexia Zampunieris

Alexia vient de publier son nouvel ouvrage intitulé « Mademoiselle cherche le soleil » aux Editions Chloé des Lys à découvrir ici