Josman nous a gratifié – le 21 juin à 00h pour la fête de la musique – d’un EP surprise, le très bon Hhhh, où on le retrouve en feat avec TayC. Mais celui qui nous lâche maintenant des couplets de lover à la perfection, provient d’un univers plus sombre, où les volutes de fumées sont en suspension, entre engagement et égo-trip.

 

 
Il est aujourd’hui l’un des rappeurs les plus écoutés parmi la jeune génération. Josman, de son vrai nom José Nzengo, est né le 28 octobre 1992 dans le Cher, à Vierzon, de parents congolais et angolais. Il aurait découvert la culture rap avec l’influence de sa sœur, qui l’aurait initié à des rappeurs classiques comme Lil Wayne, Booba, Ol Kainry, ou encore d’autres artistes RnB. Il commence par rapper dans sa chambre, sur des prods qu’il fait lui-même. Alors que Josman est en terminale, il fait la rencontre de Marius Gonzales, en seconde, qui deviendra son réalisateur de clips vidéo. Josman poste à cette époque ses sons sur son skyblog.

Un gars discret à la rime acérée

Cela fait donc longtemps, depuis ses années de secondaire, que Josman s’est mis au rap. Le baccalauréat en poche, Josman entame une nouvelle vie à Aubervilliers, après avoir quitté sa formation en langues et lettres. C’est là-bas, en banlieue nord de Paris, que Josman s’adonne aux opens mics et visite des studios d’enregistrement. Il y fera la rencontre avec son producteur attitré, Eazy Dew, avec qui il collaborera sur ses futurs projets. Durant sa vingtaine, il se fait remarquer en région parisienne en participant à plusieurs émissions et concours. En 2014, il est révélé par Orelsan dans l’émission End of the Weak et Master Classe sur France 4 : ce dernier est complètement estomaqué par la technique de Josman une fois que l’artiste prend le mic. Le MC fréquente les battles et les open-mics de la capitale. Josman, petit gars discret, au sourire gentil, se fait remarquer au concours de clashs Ready Or Not, qui a lieu à la Bellevilloise, en 2015 ; où il écrase alors son adversaire, El Deterr. A la même période, Josman sort un premier projet, Echecs Positifs, où il se distingue par son habilité à enchaîner les rimes et son phrasé complexe sur des flows différents.

« L’Afrique est en guerre pour la richesse que l’Europe lui a pris » – Matrix (intro)

Josman nous propulse dans la Matrice, en 2016, avec son projet éponyme. L’artiste prend dans le clip du son de Matrix (intro), réalisé par son pote du lycée Marius Gonzales, un virage sombre, à la fois conscient et énervé, sur une prod de Karleeto et un mix de son fidèle acolyte Eazy Dew. C’est d’ailleurs un son de son projet Matrix qui, pour beaucoup, le révèle : l’excellent et planant Dans le vide, sur une prod d’Eazy Dew. Le son La Cage (NSM) fait également parti de ses sons les plus prisés à l’époque, faisant partie de cette vibe maussade et énervée au possible. Un artiste authentique, fuckin’ real, dont les différents projets rendent compte de l’évolution musicale très riche. 

 
2017 est pour Josman une année décisive. Dans son projet sorti en juin de la même année, 000$, il emprunte un chemin plus diversifié, plus commercial, peut-être, mais sans être dépourvu d’une qualité musicale et lyricale indéniable. Sa collaboration avec Eazy Dew lui permettra toujours de sortir une musique alléchante, planante et mélodieuse à l’oreille, comme Dans le ciel. Sur ce projet, Josman dévoile un engouement et un potentiel pour nous lâcher des bangers énervés, comme MEGAZORD et Fucked Up part. II. Josman est polyvalent, c’est pourquoi il touchera à plusieurs univers au cours de sa carrière, et maniera toujours sa plume avec parcimonie, surchargeant ses auditeurs d’images, tout en se distinguant, dans ses textes, par sa grande humilité, et surtout, par sa rage pour une société qu’il juge malade. 

 
Talentueux, poétique, engagé, entouré des meilleurs, à Josman ne peut s’ouvrir que la voie du succès. On ne peut souhaiter que ce destin à un artiste dont la discographie demeure, pour le moment, irréprochable. En septembre 2018 Josman sort son premier album studio, J.O.$, unanimement salué par ses fans, qui contient presque une moitié de hits, inclassables, qui demeurent dans les classiques de 2018, entre sons old-school et musique d’exception, comme l’Occasion, Un Zder et Un Thé, ou encore WOW, XS, V&V ; trop pour les citer. Pas besoin de drill ou de zumba pour que Josman maîtrise l’art du hit, et ses sons de lover sont souvent les meilleurs.

« T’façon c’est mort j’ai perdu l’sens de la fête » – Factice

Après cette implacable réussite, le duo gagnant Eazy Dew X Josman est loin d’en avoir fini. Afin de faire patienter ses fans jusqu’à un prochain album, Josman sort un deux titres composés des très bons Feu. Bi et Factice, qui laissent présager du meilleur pour la suite. Et cet album, Split, Josman finit par le sortir le 6 mars 2020, dont les 23 titres, font référence aux 23 personnalités du personnage dans le film M. Night Shyamalan. C’est un échec commercial avec moins de 30 000 ventes, et malgré quelques bons titres, Eazy Dew et Josman tournent en rond. Une identité musicale qui s’est peut-être perdue un temps, mais dont l’artiste a parfaitement réussi à rebondir. Nouvelle année, nouveau Josman : il sort un 6 titres, MYSTR J.O.$, qui reprend cette vibe mélancolique et énervé qui lui est chère, dont l’excellent Goal en est un parfait exemple, et dont le 4ème opus de sa série de bangers Fucked Up ouvre un projet qui se révèle très bon. Introspectif, MYSTR fait référence au frère de Josman, avec qui il a confectionné les prods du projet. Et pour l’été, surprise, retour en force du Josman sentimental qu’on aime tant. Dévoilé à minuit pile, son projet de 4 titres Hhhh (Hurt Heart Hard to Heal) permet de rattraper une fête de la musique gâchée par la présence policière. 

 
On découvre un Josman qui manie à la perfection les mélodies sentimentales, et qui s’entoure d’un TayC sur My Love pour nous sortir un hit incroyable, sur une prod d’Eazy Dew. Collaboration gagnante : sur Hhhh, aucun son n’est à jeter. On y retrouve aussi la composition de son frère, MYSTR, notamment sur Señorita, et aussi les propres compos de Josman. Un court format percutant, sans doute, aussi, pour faire attendre ses fans jusqu’à l’annonce d’un prochain album. « Josman, c’est normal » : très bonne surprise de la part d’un rappeur au talent inépuisable, qui semble avoir trouvé ses multiples terrains de prédilection.

Paul Malem