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MadeInParis : le gamechanger du rap français | Entretien

Ce 18 février sortait Voulez-vous coucher avec moi ?, le nouveau projet de MadeInParis. L’occasion de revenir avec l’artiste du 75 sur ses débuts en tant qu’artiste, son rapport à l’industrie ainsi que sur ses ambitions.

Avant de plonger dans le coeur de l’album, j’aimerais que tu nous parles de la naissance de MadeInParis..

En 2012, j’ai découvert une nouvelle façon de faire de la musique lorsque j’ai écouté PARTYNEXTDOOR et The Weeknd, même si j’écoutais déjà Lil Wayne et Rick Ross. Je me demandais comment ils arrivaient à faire de la musique comme ça. Ce n’était pas juste une prod sur laquelle ils rappaient. Il y avait des effets et ils chantaient. Quand j’ai appris que ces mecs s’enregistraient eux-mêmes, ça m’a encore plus motivé. J’ai donc fait des études d’ingénieur et j’ai compris que c’était possible de tout faire soi-même, d’être autodidacte. 
 

 

La création musicale a été centrale dans ta vie si je comprends bien…

Je vais être honnête avec toi. De base, je n’aimais pas la musique. J’étais plutôt dans le graphisme, dans l’informatique. J’étais un gros geek. Mais j’ai grandi avec deux sœurs et je pense que j’ai été bercé par la musique qu’elles écoutaient dans les années 2000.

Tu sais, quand on était jeunes, je jouais à la XBOX pendant que mes sœurs regardaient MTV. Depuis, je me souviens toujours de cette époque et de ces musiques là.

Aujourd’hui, ma musicalité vient de ces sons que j’entendais quand j’étais plus petit. C’est pour cela que mes références musicales ne sont pas majoritairement récentes mais plutôt axées sur les sons à l’ancienne. Quand j’écoute de la musique, je recherche une sonorité qui fait ressentir quelque chose. Je ne m’arrête pas à la prod, je préfère me concentrer sur chaque détail. Quand il y a une incohérence entre les éléments, ça ne me parle pas du tout.

J’ai l’impression qu’on te compare souvent à Hamza. Je pense à vos mélodies, vos ambiances et vos influences tirées du rap et du RNB américain. Comment tu la prends cette comparaison ?

Je vais te dire la vérité : le business, c’est le business. Quand on te compare à quelqu’un, ça peut être considéré comme du bad buzz, en mode mauvaise pub. Moi, c’est ce qui m’a permis de signer. Je comprends pourquoi les gens disent ça, je suis réaliste. Même si je ne suis pas d’accord quand on me dit que c’est exactement la même chose, je pense juste que nous avons les mêmes influences.

On a chacun notre style, mais de par nos choix de prod et nos manières de poser, on peut sentir qu’on écoute la même chose. Je suis sûr que si on se retrouve dans la même pièce et qu’on observe chacun nos playlists, c’est sûr qu’on valide celle de l’autre. En fait, je prends ça comme un compliment. On me compare à un artiste en place et que j’écoute à fond. Moi ça me fait plaisir, c’est pas comme si on me comparait à un artiste flingué. 

Je me dois donc de te demander si une collaboration avec le Sauce God est possible à court terme ?

Non, pas du tout. Dans le sens où je ne suis pas très ouvert aux feat. Pour en faire, il faut que je connaisse la personne, qu’on se soit rencontrés avant. Je suis du genre à avoir confiance en mes choix et en mon parcours. A l’avenir pourquoi pas ? En attendant, je préfère me concentrer sur moi et sur les têtes qui m’entourent. Quand j’aurai son niveau d’exposition, on pourra peut-être travailler ensemble si on me le propose. Ça ferait plaisir à nos publics. Mais pas maintenant.
 

 

Dans tout ce que tu nous dis, il y a cette volonté de rester authentique, de faire venir le public à toi plutôt que d’aller vers le public…

Oui, voilà. Ça fait partie des conseils que l’on m’a donnés. J’ai sorti Quel beau jour pour mourir en tant que carte de visite. Cette fois-ci j’ai pas envie de me livrer sur le plan personnel, mais j’ai envie d’expliquer qui est MadeInParis. J’ai envie de montrer comment on peut le comprendre et l’imaginer MadeInParis, c’est pour ça que je raconte certaines de mes histoires avec pas mal de détails, tout en y accordant un grand soin pour les mélodies. J’ai pas envie de juste raconter ma vie, je veux le faire de manière catchy et fun, avec des prods dans mon délire.

Et ça se sent au moment de l’écoute. C’est d’autant plus intéressant parce que ce projet sort dans une période du rap dans laquelle tout se ressemble plus ou moins, alors que Voulez-vous coucher avec moi ? sort des codes établis. Toi, en tant qu’artiste, est-ce que cette uniformisation de la musique dans l’industrie du rap, c’est quelque chose que tu observes ?

Tout le monde veut réussir maintenant, parce qu’on a compris à quel point c’était accessible. Mais personne ne veut prendre le risque de faire ce qu’il aime vraiment faire. Personne ne veut prendre le risque d’y croire. Moi, je sais très bien que je peux faire les sons des têtes d’affiches, je peux faire les sons qui passent à la radio. Ça va sûrement marcher, mais je ne serai pas démarqué. Et c’est mon but d’être démarqué, sinon tu m’entendrais que dans des sons qui passent dans les chichas, dans les radios, dans le commercial. Avant d’arriver au commercial, j’ai envie que ma musique soit comprise et explique le développement que je vais connaître dans les 5 années à venir. J’ai envie que, lorsque j’aurai percé, les gens puissent revenir en arrière et écouter Quel beau jour pour mourir et Voulez-vous coucher avec moi pour comprendre le délire de ma musique. Je ne veux pas faire du commercial  maintenant et seulement après exprimer mon vrai délire, je préfère faire l’inverse. Comme Laylow, il avait son délire à lui pendant 5 ans, et regarde le aujourd’hui, il remplit des stades facilement.

Dans l’album tu expliques souvent comment les relations peuvent freiner tes ambitions… Quelles sont tes ambitions actuellement ?

Pour l’instant, c’est d’être dans le top 10 du pays dans lequel je vis. Ensuite, c’est d’être top 1. Ensuite, c’est l’international. Comme j’étais ingénieur avant, le premier projet professionnel sur lequel j’ai travaillé, c’était Aya de Aya Nakamura. Le premier son, c’était Djadja. Il est parti de zéro et il a tourné dans le monde entier. Moi, il me faut mon Djadja. Arrivé à ce stade là, t’as frappé le pays, le continent et le globe. Et ensuite, c’est toi qui gère le destin.
 

 

Ton projet s’appelle Voulez-vous coucher avec moi ? On fait comment si je dis oui ? 

[Rires.] Je savais, en appelant le projet comme ça,  que le public allait s’attendre à des morceaux très sensuels. Alors que dès le premier titre, il comprend qu’il ne s’agit pas que de ça. En fait, c’est une proposition. Sauf pour les mineures [Rires.]. La question, c’est plutôt :  « Est-ce que vous voulez faire partie du mouvement ? Est-ce que vous voulez rentrer dans ma vibe ? ». C’est ce que je vous propose. Venez, on y va à fond.

Est-ce que le projet sera disponible sur OnlyFans ?

Franchement, on y réfléchit. Je ne peux pas en dire plus pour l’instant. Mais c’est sûr qu’il y aura beaucoup de choses en commun avec ce genre de plateformes. On a envie de vous surprendre. 

Et c’est tout ce qu’on te souhaite. Avec quels mots t’as envie de conclure cet entretien. Quel message tu veux faire passer à ton public ?

Soyez toujours sereins avec vos ambitions. Si vous avez des objectifs, croyez-y à fond. C’est quelque chose qui prend du temps. Dans la vie, tu n’auras jamais ce que tu veux facilement, c’est pourquoi il faut continuer et rester serein.

Propos recueillis par Youssef Basbas