A l’occasion de la sortie de son album « Dieu est grand », nous avons rencontré Sam’s, rappeur de l’écurie Bomayé Musik. Celui qui écume toutes les scènes aux côtés de Youssoupha vient de dévoiler un bout de vie dans son premier projet solo sorti le 23 octobre. Rencontre.
Comment ne pas parler du clip « Itachi Uchiwa ». Tu peux nous parler de la réalisation de ce clip réalisé à l’image d’un manga ?
Je suis un très grand amateur de manga. Cehashi, le co-réalisateur de l’album, est aussi un fana de Naruto. Itachi Uchiwa vient justement de cet univers. C’est un personnage très mystérieux et profond, assez complexe même. J’ai trouvé intéressant de faire un parallèle entre sa complexité et la mienne. Cehashi a utilisé le sample de Naruto lorsque Itachi Uchiwa apparaît. On a voulu aller plus loin avec un clip en manga. Et voilà le résultat.
Avec ce clip, vous montrez encore une fois que Bomayé Musik est en recherche perpétuelle d’originalité…
On part du principe qu’au-delà du partage de notre musique, il faut apporter une plus value. Aujourd’hui, tout le monde fait des morceaux. C’est toujours bénéfique de proposer de la musique avec un contenu atypique qui permet de valoriser celle-ci. À chaque fois, nous avons un concept qui crée une émulation. De fil en aiguille, on grimpe de plus en plus dans la créativité. C’est comme quand tu es entre potes et que vous faites des jeux de mots entre vous. À chaque fois, vous mettez la barre plus haut. Chez Bomaye Musik, c’est le même cheminement au niveau de la créativité. On s’éclate.
Dans ton morceau « Microbes », tu décris une réalité de jeunes de quartier à peine majeurs noyés dans les vices. Est-ce que c’est un constat de la réalité d’aujourd’hui ou celle de ton époque ?
C’est un mélange des deux. Mais je ne suis pas là pour être un donneur de leçon, tout comme je ne fais pas l’apologie de cette réalité. C’est du ressenti. Beaucoup de gens sont passés par ce genre de mode de vie. Chacun est plus ou moins microbe. C’est une époque rebelle, à un moment donné de la vie, dans laquelle tu n’en as rien à foutre.
En même temps, je me rends compte que c’est un constat qui traverse les générations. Il n’est pas fataliste, cependant. La preuve : le recul que j’ai, aujourd’hui, est le signe de mon évolution. Il ne faut pas le prendre comme étant un fléau qui ravage la jeunesse, mais plutôt un passage comme un autre de la vie de tout un chacun.
L’issue du clip n’a pas de happy ending…
J’ai voulu laisser le suspens. La morale de l’histoire de ce clip est un serpent qui se mord la queue. Finalement, il n’y a pas de gentils ni de méchants. Je ne voulais pas de happy ending car ça voulait forcément signifier qu’il y a une fin. Dans ce clip, c’est un moment de vie que j’ai voulu retracer. Il y a, certes, le commencement, mais pas de fin pour ne pas tomber dans le fatalisme. Et puis, je voulais montrer que je n’ai pas la prétention d’avoir la science infuse sur le bien et le mal.
D’accord…
(Il coupe) D’ailleurs, le clip a été tourné par un Belge !
Ha bon ?
Par Frank Luckaz !
Ha ! Il va signer chez Bomaye Musik ou quoi ? J’ai l’impression qu’il fait beaucoup de clips pour vous en ce moment…
On aime bien son travail ! Je crois que j’ai rencontré Frank Luckaz pour la première fois lors du tournage du clip « Revolver » de Youssoupha. On avait déjà accroché et on s’était dit qu’on allait faire un clip ensemble. Lorsque j’ai eu la possibilité de faire « Microbes », je l’ai appelé sans hésiter.
Parlons aussi du morceau « QDMP », une espèce de story telling. Tu n’as pas l’impression qu’aujourd’hui, cette manière de concevoir un morceau se fait de plus en plus rare ?
Ouais. La tendance est ailleurs. Ce n’est pas une plainte, attention. Mais je trouve qu’actuellement, cette tendance est dans la surenchère, dans l’énergie brute. C’est un peu plus fast food. Peu d’albums contiennent des story telling actuellement. Je trouve ça dommage. Je pense qu’il devrait y avoir un équilibre. Comme tout le monde, j’aime écouter des morceaux « bêtes et méchants », mais aussi des morceaux qui se réécoutent. Tout va très vite aujourd’hui, en général.
En 2012, tu annonçais la sortie de cet album. Il sort qu’en 2015…
Différents paramètres sont entrés en jeu. En parallèle de la musique, je suis aussi comédien. En même temps, j’étais sur la tournée avec Youssoupha. Puis les histoires de la vie aussi. Du coup, je ne voulais pas sortir un album juste pour le sortir. Je voulais faire un projet abouti et le sortir dans les meilleures conditions.
Justement, quand est-ce qu’on pourra voir Sam’s sur les écrans ?
Plein de choses. Je suis sur un projet de fiction, une série aussi. Il est aussi prévu de faire le long-métrage de « En attendant demain ». On a fini l’écriture en tout cas. Au passage, l’an dernier j’ai tourné dans un film belge ! « Les Rayures du zèbre » avec Benoît Poelvoorde. Je faisais le footeux qui se fait recaler d’Anderlecht parce qu’il est bourré.
Un dernier mot ?
J’espère que les gens qui apprécieront cet album le feront savoir à d’autres. La force est dans le partage !
Propos recueillis par Nikita IMAMBAJEV