Après 5o jours sous les bombes, une trêve était annoncée le 26 août 2014 entre Palestiniens et Israéliens. Le lendemain, Médine, rappeur et homme engagé, nous offrait le clip de « Gaza Soccer Beach », un hymne à la fraternité où il dénonce avec humilité et sans détours l’hypocrisie des gouvernements et des institutions internationales durant ce conflit. Le titre rend hommage aux quatre enfants palestiniens assassinés sur une plage de la bande de Gaza le 16 juillet 2014. Le clip cumule actuellement près de 100 000 vues.
« Un vieux ballon sur une jeune poitrine, Amorti du plastron dans le camp des apatrides ». Voici les premières paroles de « Gaza Soccer Beach », la dernière envolée lyrique offerte par Médine. Dans ce pamphlet aux couleurs de la Palestine, Médine se fait messager – pour un rappeur qui porte le nom de la ville du dernier prophète c’est chose toute naturelle – et délivre un discours détonnant de vérité tout en dénonçant l’hypocrisie des dirigeants, occidentaux ou non. Une mélodie douce qui accompagne un message fort mais surtout qui reprend l’histoire, horrible et acerbe, telle qu’elle a été vécue par les Palestiniens le 16 juillet 2014. Ce jour-là quatre enfants de la même famille, Muhammad, Ismail, Zakariya et Ahmed Bakr se plaisent à taper sereinement dans le ballon, les pieds chargés de grains de sable, sur une plage de la bande de Gaza. Soudain, le calme est rompu par le bruit de missiles, envoyés depuis le large par ce que certains osent encore appeler une « armée morale ». A mentionner que les actions militaires n’ont jamais été très proches de la moralité, pour exemple, cette chose communément appelée guerre. Les enfants pris de panique s’enfuient, mais c’est avec toute la bêtise que l’homme connaît que les soldats continueront de tirer jusqu’à atteindre leurs cibles, touchant au passage d’autre cibles: la stupidité et l’inconscience éveillée. Par la suite, les images des corps déchiquetés seront reprises par les journalistes. Des images insoutenables quand on songe aux instants d’innocence qui précèdent le bombardement. Aveux contre leur gré de la sauvagerie dont les soldats israéliens font preuve.
Un clip engagé et engageant
La vidéo, produit estampillé du sigle de Din Records et de Don’t Panik, nous fait passer des douces images de l’innocence où les enfants jouent sans s’inquiéter aux images plus lourdes de sens où des personnages prennent leurs aises, observant sans agir cette tragédie humaine. Tragédie humaine qui était tout aussi condamnée par Kyung-wha Kang, sous-secrétaire générale des Nations Unies aux affaires humanitaires en plein conflit, exhortant les gouvernements à l’action mais qui pourtant n’a eu aucun impact réel. Ces personnages qu’on reconnaît comme étant l’Européen ou à défaut l’homme de l’Occident, l’Israélien, le dirigeant Arabe (Saoudien) ainsi que le journaliste. Ceux-là mêmes, aux premières loges de l’horreur se partagent pop corn (gracieusement fournis par l’ONU), fument le narguilé, prennent quelques clichés et se délectant du spectacle de l’infamie, un peu comme on le fait au cinéma mais cette fois-ci les enfants, le sang, ce n’est pas du ketchup !
En plus du clip, le making of est également en ligne, ils y dévoilent la démarche de la vidéo et les actions qu’ils ont menés en parallèle pour soutenir la Palestine. A noter que le titre est toujours disponible en téléchargement et que les fonds seront reversés à une association palestinienne.
Et demain la Palestine ?
L’inaction a été maintes fois reprochée entre autres aux dirigeants arabes, qui de part leur proximité au conflit et leur influence dans la région devraient être les premiers à agir. Il en est de même pour l’ONU, cette organisation qui naquit comme phénix des atrocités de la seconde guerre mondiale, un peu comme un cri d’espoir au milieu des balles mais qui pourtant semble avoir fait plus figure de pantin que de réel acteur pour la paix durant ce conflit.
Aujourd’hui, la question qu’il faut se poser est celui de l’avenir de la Palestine. Certes la Palestine a existé. Son passé n’est pas à remettre en question sinon ce serait pour moi nier l’existence des Palestiniens, ce qui est impossible puisqu’il faudrait alors nier le conflit en lui même. Toutefois, rien n’est sûr quant à son futur. Une trêve aussi fébrile qu’un adolescent israélien, mitrailleur automatique en mains, prêt à lâcher le feu au moindre coup de vent. Le terme même par lequel on désigne cette « paix cigarette » (comprenez qui se consume aussitôt que l’on commence à tirer dessus) : « trêve », implique la reprise d’une guerre inévitable. Une trêve n’est jamais éternelle, ce mot même me gêne, un peu comme si cette guerre cherchait sa fin dans celle des Palestiniens.
Si les bombes ne pleuvent plus sur Gaza, les larmes sans doute se sont mises à couler, comme sorties de l’hibernation que la force et le courage inspirent. Il n’a jamais été aussi humain et primordial que de porter les droits des Palestiniens aux cotés de nos devoirs : leurs droits à la dignité et à la liberté aux cotés de nos devoirs de résistance et de dénonciation. Ils forment, ensemble, l’étendard de l’Humanité qui flottera dans le ciel, comme les âmes condamnées à errer, portées par la fraternité et la solidarité pour ceux qui portent encore leur enveloppe charnelle et qui ne se sentent pas encore totalement chez eux, dans leur propres maisons. Nous nous devons de continuer le match que les enfants Bakr n’ont pu terminer, pour eux et pour nous.
Le drapeau de la Palestine n’a jamais été aussi sincère : le blanc pour l’innocence, le rouge pour le sang perdu, le noir pour le deuil et le vert pour l’espoir.
Mohamed El idrissi