Allez, viens on partage !
La musique, les photos, les potos, le potage, les potins.
J’ai entendu dire qu’ils avaient pendu un chef d’État.
Qu’un fou avait pris deux tours dans une immense partie d’échecs.
J’ai cru comprendre qu’une religion était diabolisée.
Celle où ils croient en Jésus, où ils mangent de la viande Kasher, celle où il faut se rendre au moins une fois par semaine dans un lieu sacré, celle où on se respecte et où on ne Tuera Point. Celle où se couvre le chef au couvant. Celle où on croit au Paradis et à l’Enfer après le couchant. On en discute ?
Allez, viens on partage ! Nos peurs, nos doutes, nos dettes, nos routes. Nous routeurs. Nos soutes, nos quêtes. On goute nos fêtes. On coupe, des bêtes, somme toute. Tous. Quelle que soit la direction dans laquelle on prie. Quelle que soit la prison dans laquelle on vit. On s’en construit tout seul. Des toutes belles dans la tête. Des modernes. On s’incarcère. Et on s’accorde dans la journée, une heure de promenade. Parfois, on va boire un verre au parloir. Parfois, le maton dans mon crâne me fait du mal en oubliant que je l’ai crée.
Allez, viens on partage ! Notre expérience de vie. Qu’on intègre que pour chacun de nous une peine de coeur est une petite peine de mort. Qu’on protège tous les siens de la même manière, moi, tu les touches à peine, je mords. Qu’on comprenne qu’on pousse tous un peu de travers. Que le regard d’autrui nous fige. Que chacun fixe ses limites. Par nécessité. Que les choses restent en l’état par notre cécité. T’inquiètes, ton sirop de Liège ne va toujours pas à la mosquée. Il ne lit pas de droite à gauche et n’est pas radical. Il se laisse toucher par des mains propres ou des mains sales. Des circoncises, des qui portent la Kippa. Des Breivik, des pilotes de Germanwings. Même si y en a qui parlent.
Allez, viens on partage !
Avant d’être remplacé par des automates. Mate mon auto. Mes fautes. La saisie automatique à bon dos. L’absentéisme en milieu scolaire crève le plafond, mais la saisie automatique à bon dos. On jugule la misère dans des check point. Une virgule change ta vie. Celle sur un chèque ou sur tes baskets. Vont quand même pas rester prostrés dans des bosquets. Pour protéger leurs arrières et se sentir libre, il leur faudrait un Sergio Busquets. Pour le moment, ils attendent. Et font le pied de grue. Mec, à force de les charrier, même les grues finissent par tomber. La nature nous rappelle à l’ordre. Viens, on vit sur une nouvelle planète dans une seule très grande maison. Viens à pied. L’économie de partage nous embrasse en nous tordant le cou. On en parle à la pendaison de crémaillère. Les taximans voudraient le beurre. Et l’argent d’Uber. Mais le risque demeure, qu’ils se prennent juste un gros doigt d’honneur de la crémière.
Youness Mernissi