Membre du légendaire groupe la Mafia K’1 Fry, Dry reste l’une des pierres maitresses de l’édifice du rap français. Présent depuis de l’âge d’or du mouvement, l’Amiral perdure dans le paysage musical actuel. Alohanews est parti à la rencontre de l’intouchable du 94, pour la promotion de son nouvel album « Maintenant ou jamais ». L’artiste signé chez Wati B parle de son album, de liberté d’expression ainsi que de la possible reformation de la Mafia k’1 Fry. Tout  le monde à terre !

L’album « Maintenant ou jamais » est sorti le 14 octobre dernier. Quels sont les premiers retours ?

En général, beaucoup de bons retours. Il y a une petite partie qui est surement déçue à voir un album de Dry différent de ce qu’il faisait avant. Je pense notamment aux adeptes de mon rap virulent de l’époque.

Justement, tu avais ce côté hardcore avec des morceaux comme « Tout le monde à terre ». Aujourd’hui, tu touches le grand public. Comment fais-tu pour jongler entre ces deux catégories de fans ?

Être un artiste c’est aussi savoir s’exprimer dans tous les registres. On a été à l’école donc on sait se servir de la langue française. On n’est pas obligé d’utiliser notre argot de cité 24/24h pour communiquer avec les gens. J’ai voulu élargir mon public en délivrant un message plus clair, ouvert à tous tout en restant fidèle à moi même.

Toutefois, l’univers « street » est très présent dans tes morceaux. Avec le recul, quel regard portes-tu sur la rue d’aujourd’hui ?

Elle n’a pas changé sauf qu’elle est peut-être encore plus violente. Avant, ça se tirait dessus, mais aujourd’hui ça se tire tous les jours dessus ! J’exagère un petit peu sans doute, mais les générations actuelles vivent avec de la violence au quotidien. Que ce soit dans les films, dans les jeux ou dans la musique. En prenant de l’âge, certains finiront par prendre conscience. Aujourd’hui, j’ai une vie de famille ainsi qu’un recul nécessaire pour voir la vie différemment. Avant de prendre de la maturité, je voyais la rue comme un moyen de s’en sortir. C’était le but. Faire de l’argent par tous les moyens possibles. C’est le cas d’un tas de jeunes aujourd’hui. Mais attention, elle sera toujours aussi sévère avec ceux qui tenteront de la dompter.

Le collectif Mafia k’1 Fry a connu beaucoup de décès comme celui de Dj Mehdi, Mamad ou LAS. Peux-tu nous parler de « 14 ans déjà », morceau en hommage au regretté LAS Montana ?

À travers ce morceau, j’avais l’impression de m’adresser directement à lui. Je devais vider mon sac. Je n’étais pas prêt à le faire avant. Faire de l’argent avec le décès de ses proches je ne trouvais pas cela juste. Aujourd’hui, ça fait 14 ans. L’eau est passée sous les ponts. Je me devais et me sentais prêt à en parler.

Age d’or & rap français

La Mafia K’1 Fry de nouveau réunie. Des rumeurs qui se concrétisent ?

Chacun des membres vaque à ses propres occupations donc on a du mal à tous se réunir en même temps. C’est primordial de retrouver cette complicité d’antan pour faire un album sincère avec l’écriture d’aujourd’hui. C’est beaucoup de travail. Pour le moment, nous sommes en pourparlers avec quelques morceaux enregistrés.

L’album sortira sous le label Wati B il paraît ?

(Il réfléchit) Je ne sais pas. Tu as des infos bizarres toi (Rires) ! Faisons déjà un bon disque. Ensuite, il sortira où il devra sortir.

Tu en as traversé les époques du rap français, vu de toutes les couleurs, de tous les flows. Quels sont les rappeurs qui t’ont marqué ?

J’aime beaucoup le rap. Beaucoup de gens m’ont marqué dans ce milieu. MC Solaar par exemple. Tu vas me dire que c’est bizarre, mais il fait partie des gens qui nous ont donné envie de pratiquer cet art. Plein de rappeurs venaient à Orly lorsqu’on était encore gamin. On les voyait ensuite à la télévision. C’était un truc de dingue ! NTM, IAM, Kery James c’est toute cette époque qui fait ce qu’on est aujourd’hui. Puis il y a Lionel D, Little MC et tous les précurseurs du rap hexagonal. Le 94 était un vivier d’artistes !

Tu as participé à un morceau pour la BO du film « La Marche » qui a fait polémique…

(Il coupe) Ha ouais il faut faire gaffe quand tu parles (Rires) !

Récemment, en France, il y a une atmosphère assez austère où le racisme devient une opinion. Comment vois-tu cette situation ?

Le racisme ne date pas d’hier. Concernant le film, je l’ai vu et j’ai bien aimé. Il y a des parties de l’histoire qu’on ne nous a pas apprise à l’école. Et puis, je ne sais même pas si on nous apprend vraiment de l’Histoire. Enfin, on te raconte l’Histoire des gens qui ont envie de te là raconter à leur manière. Il y a plein de choses que j’ai appris aujourd’hui qui a été oublié par l’éducation scolaire. Concernant la polémique et le morceau, on dit simplement ce que l’on pense. Même si on se sent outré, Charlie Hebdo et compagnie ont une certaine liberté d’expression difficilement critiquable. C’est la liberté d’expression, c’est les règles du jeu. Nous aussi on a le droit de dire ce que l’on pense. Cette liberté ne doit pas être à géométrie variable.

Un dernier mot pour Alohanews ?

Gros big up à vous ! Je ne vous connaissais pas, mais dorénavant je vous connais et ce n’est pas prêt de se terminer ! On est ensemble, Wati B. Les derniers seront les premiers !

 

Propos recueillis par Nikita Imambajev