Aujourd’hui, chacun désire être célèbre ne serait-ce que le temps d’un snap. Quelques secondes sous les projecteurs et l’égo se satisfait. En 1968, un artiste de Pittsburgh disait qu’à l’avenir, chacun aura droit à 15 minutes de célébrité mondiale. Il avait vu juste même si nous sommes bien loin du quart d’heure de gloire. #AndyWarhol

Les voyeurs aboient à l’approche de la caravane aux nombreuses vitrines transparentes. Ils s’impatientent. Encore des images. Ils les reluquent. Encore des vidéos. Encore et encore ! Le voyeurisme clique constamment et partage toujours le quotidien banal des humains. C’est sa raison d’être. Si le flux d’images s’arrête, les démangeaisons commencent. Son appétence est sans fin, c’est un désastre que de ne pas pouvoir zieuter l’existence des autres. À y voir de plus près, nous sommes devenus des zombies inertes faisant défiler des instants de vie éphémères qui, d’après l’application, disparaîtront le lendemain. Foutaises ! On retire peut-être tout des étalages mais c’est sans compter sur le fait qu’il faille encore nourrir l’arrière-boutique. #BigBrother

Il faut être vu à tout prix, être aimé des autres au détriment de son soi intérieur. Peu importe ce que le miroir reflète, l’essentiel se trouve sur les réseaux sociaux. Ces tribunaux de l’image deviennent les lieux de tous les excès. Pudeur violée, égocentrisme exacerbée, tout est envisageable. Néanmoins, la retenue n’est que très peu envisagée. Plaire à mille personnes éclipse l’importance d’une mise en relief de sa personne, une illusion aveuglant une réalité terrible. Le citoyen est devenu ce consommateur narcissique, toujours à l’affût d’un buzz autocentré et disciple de la « starification ». Au plus profond de nous-mêmes, nous savons pertinemment ce que nous recherchons… L’approbation de la majorité, au risque de voir notre liberté et notre vie privée y perdre quelques plumes. La prison du like est entre nos mains et nous nous y enfermons inconsciemment. Pire même : nous jetons volontairement les clés par la fenêtre. Préférant répondre aux codes des phénomènes de mode, s’aliénant délibérément mais avec des oreilles et une langue de chien. #DogFace

Suis-je un auteur subversif si je couche sur papier ce genre de critique ? Non. Sûrement pas. Ce serait me donner le statut d’icône intellectuel que je ne mérite pas. Par contre, je sais qu’en disant que celui ou celle qui poste un selfie ne peut s’empêcher d’épier le nombre de j’aime, chaque notification étant épinglée, je mets là le doigt sur une vérité. Cette dernière me concerne tout autant que vous. Que celui qui n’a jamais immortalisé son autoportrait me jette le premier commentaire. Nous nous aimons à travers les écrans des millions d’inconnus. C’est une addiction sans nom. Une seringue connectée pleine d’un amour enivrant mais vide. #SocialDrug

Ce billet d’humeur finira probablement dans les oubliettes et ne sensibilisera que quelques-uns d’entre vous (en commençant par moi). Une chose est inévitable, c’est que je vais assurément m’attirer les foudres des Jocondes d’Instagram, qui construisent leur estime de soi en fonction du nombre de pouces admiratifs. Je sais à quel point il est indécent de vilipender les médias sociaux. Mettez cela sur le compte de ma désinvolture. Ce n’est que mon opinion, j’espère simplement qu’elle n’aura pas été interprétée comme une énième leçon de moral donnée par un chroniqueur, qui au final, ne cherche qu’à récolter l’élixir de jouvence de notre époque : « like & share« .

Maroan