Montreuil fête le retour du jeune humanitaire Moussa Ibn Yacoub suite à sa détention arbitraire au Bangladesh en décembre dernier alors qu’il œuvrait auprès des Rohingyas, « peuple le plus persécuté au monde » selon l’ONU.
Enfin de retour en France après sept mois, dont trois en détention, il a pu savourer sa libération auprès de ses proches mais aussi de toutes les personnes s’étant mobilisées autour du mouvement #FreeMoussa. Reportage.
Mercredi 10 août, 18h30. Le rendez-vous est donné sur le parvis de l’Hôtel de Ville de Montreuil, commune qui a vu grandir Moussa. Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées afin de témoigner leur soutien à l’enfant de la ville. Le rassemblement fut précédé d’une conférence de presse où Moussa a enfin pu prendre la parole. Cette parole que certains souhaitaient faire taire en emprisonnant l’humanitaire alors qu’il tentait de porter haut et fort celle des Rohingyas : « Souvent, on se bat, on fait tout pour faire entendre les choses. Parfois, il faut être atteint d’un mal pour en ressortir un bien et, le mal, il fallait que j’en sois touché pour que les Rohingyas puissent avoir une porte de sortie », raconte Moussa.
Après avoir remercié toutes les personnes qui l’ont activement soutenu, il revient sur son histoire en expliquant que quelques jours après son arrivée au Bangladesh, lors d’un contrôle à un checkpoint, il se voit emprisonné. Il lui est alors reproché de mener des « activités illicites ». Cette charge, qui n’a rien de très explicit, va le maintenir en prison durant plus de trois mois dans des conditions très difficiles. Moussa insiste sur le fait que la mobilisation et le soutien national voire international, dont il a été informé par le Consule, lui ont été d’un grand réconfort lorsqu’il était dans les geôles bangladaises.
« Mon combat c’était avant tout de faire entendre une voix »
Fatiha Khettab, porte-parole du comité #FreeMoussa regrette le faible soutien des parlementaires français dans cette affaire, notamment ceux de Gauche, et parle de « deux poids et deux mesures ». Au vu des grandes difficultés et des nombreux rebondissements judiciaires qu’a connu cette affaire, l’implication et l’impact de l’État français dans la libération de Moussa se voit questionné. Elle remercie cependant le Quai d’Orsay en précisant que les ressorts de la libération sont en quelque sorte secrets car s’étant déroulés « en coulisses ». Ce sont finalement 150 élus qui ont signé pour sa libération.
Il est cependant frappant de voir que Moussa a été victime, comme il le souligne lui-même, de maladresses et de jugements de valeur, notamment concernant son employeur Barakacity, association musulmane controversée qui a été au cœur d’une vive polémique portée par les médias de masse. Fatiha Khettab ajoute qu’en s’attardant sur « des polémiques futiles et dangereuses », le combat à mener pour libérer Moussa a été entaché et celui des Rohingyas aussi par la même occasion. Les journalistes Claude Askolovitch et Florence Aubenas sont cités et remerciés pour leur prise de position claire en faveur de la libération de Moussa.
La municipalité de Montreuil, qui a exprimé son soutien absolu à Moussa et ses proches et ce, depuis le début, a invité le jeune humanitaire à venir décrocher l’affiche géante portant sa photo qui avait été placardée sur le fronton de l’Hôtel-de-Ville au cours du mois de Janvier.
https://www.youtube.com/watch?v=L5-yn6ewxxM
Comme on peut l’entendre sur la vidéo, la foule acclame le jeune héros par des « t’es le meilleur ! » et « on t’aime Moussa ! ». En revanche, la présence de Dominique Sopo, président de SOS Racisme, suscite les huées de la foule. On entend même une personne s’écrier « de toute façon vous n’avez rien fait depuis le début ! ». Sa venue, qualifiée de récupération politique, a également été vivement critiquée par les internautes sur Twitter.
Une autre revendication s’est fait entendre lors de ce rassemblement, celle du groupe de soutien à 13 familles Roms récemment délogées à Montreuil. En se souvenant qu’il avait commencé son combat auprès des plus démunis en venant en aide à des familles Roms de sa ville, Moussa n’a pas hésité un seul instant à partir à leur rencontre.
Moussa n’a cessé de remercier ceux qui l’ont soutenu mais il était aussi important pour les personnes rassemblées devant l’Hôtel de Ville de Montreuil d’être présentes physiquement, après s’être beaucoup mobilisées sur les réseaux sociaux, et de le remercier à leur tour. Le remercier d’avoir mis en lumière le sort des Rohingyas que beaucoup ne connaissaient pas auparavant. Le remercier pour la leçon d’humilité, de courage et d’endurance qu’il leur a donné. Le remercier aussi d’être un exemple pour tous les jeunes Français.
Malgré sa grande fatigue, il a pris le temps de poser pour des photos et de saluer tous ceux qui sont allés à sa rencontre, sans jamais perdre ce grand sourire qui le caractérise. Ce sourire, nourri par un soutien inconditionnel de tant de gens, sans distinction de classe, de couleur ou de religion.
« Avec mon histoire, j’ai l’impression qu’il y a un message d’espoir. C’est en tout cas comme ça que je l’ai ressenti », confie Moussa.
Un rassemblement qui prouve que, malgré le contexte difficile en France et en vertu des valeurs qui animent tous les Français, nous pouvons faire cause commune.
Yasmine Mrida
Pour en savoir plus sur son projet Bani Street :