Osez le foulard. Cette nouvelle vague tendance qui déferle dans les rues de Bruxelles, poussant les femmes de toutes origines à orner leurs cheveux d’un foulard aux tendances africaines. Ce défi, Ange le relève avec succès dans la capitale bruxelloise. Alohanews rencontre cette jeune empower woman qui, au travers des ateliers, des pop-up store et lors d’événements culturels, promeut une beauté africaine universelle et indémodable. Rencontre.

Ange, qui es-tu ?
Ange, fondatrice de « Osez le foulard »

D’origine rwandaise, je me définis essentiellement comme une ambassadrice de l’Afrique. Je participe à poser ma pierre à l’édifice quant à la promotion d’une Afrique positive. Je trouve que l’image qui est mise en avant de l’Afrique n’est pas toujours valorisante. À côté de tous les problèmes véhiculés, l’on a de très belles choses qui sont uniques. Par l’attaché du foulard, j’essaye de mettre en avant une de ces facettes positives.

Parle-nous de l’activité « Osez le foulard »?

«Osez le foulard» est un mouvement qui a pour but de promouvoir la beauté de la femme africaine. Je suis absolument amoureuse de la femme africaine, je trouve même que nous avons les plus belles femmes au monde (rires). Malheureusement, ces femmes ne sont pas mises en avant. Grâce à ce mouvement, on veut réveiller la reine qui sommeille en chaque femme.

Est-ce que tu promeus également le mouvement « nappy » (ndlr : mouvement désignant les femmes noires souhaitant conserver leurs cheveux crépus) et tout ce qui pourrait émanciper la femme africaine de la « beauté occidentale » ?

Personnellement je suis nappy, car je n’ai jamais défrisé mes cheveux. Par contre, il y a un véritable problème avec ce mouvement qui pourrait faire croire que « les nappy » sont dans le bon chemin et que les autres seraient dans le mauvais. Même si je prône constamment une acceptation de la femme au naturel, j’ai peur que tous ces mouvements meurent après un certain temps. Si le nappy est une mode, elle prendra fin, car toute mode à une fin. Je prône plutôt la prise de conscience et l’acceptation de la beauté de la femme sans imposer ma vision.

Est-ce qu’il n’y aurait pas dans ton mouvement une sorte de communautarisation de la beauté ?

Cette remarque je l’ai déjà reçue plusieurs fois. Je respecte vraiment toutes les convictions, car ce que j’essaye de faire c’est de mettre en avant un art, une beauté grâce à un accessoire.

Quand on regarde au niveau belge, les beautés qui sont mises en avant sont les Caucasiennes. C’est un peu logique, car nous ne sommes pas la cible première de leur promotion. Je ne critique pas cela bien entendu, mais d’un autre côté il faut accepter que d’autres mouvements se mettent en marche pour cibler une beauté spécifique, sans pour autant que cela soit étiqueté de communautariste. Chaque pays a sa manière de penser ses critères. Dans un monde aussi pluriel, il faut pouvoir s’ouvrir à l’autre. Ce qui fait toute la différence, c’est le vivre ensemble.

Par ce « vivre ensemble », tu vises donc une clientèle beaucoup plus large ?

Oui bien sûr, le mouvement vise toutes les personnes intéressées par la beauté africaine. Par exemple, les femmes musulmanes sont également visées, car pour moi elles ne sont pas assez mises en avant, notamment par l’image de la femme voilée qui ne peut pas être « tendance ». Je fais bien sûr très attention à ne pas imposer ma vision de la chose et ne pas aborder le phénomène religieux. Cela ne m’empêche pas de faire des shooting photo avec des femmes voilées. Le fait de le faire symbolise l’ouverture du mouvement. D’ailleurs, il y a énormément de femmes musulmanes intéressées par cette initiative.

Justement, as-tu eu des réactions qui ont associé ton mouvement à un mouvement religieux ou provocateur ?

Oui beaucoup de personnes ont pris mon initiative comme étant un «  Osez le voile », dans le sens « voile islamique ». Au départ, j’avais créé un événement Facebook juste par passion, car beaucoup de personnes me demandaient comment je nouais mes foulards. C’est vrai que le nom est un peu provocateur et beaucoup de personnes peuvent avoir des a priori. Par contre, une fois qu’ils participent à mes événements, ils constatent que mon but est de mettre en avant les minorités sans cibler une idéologie particulière.

Est-ce que tu veux faire de ton mouvement un mouvement national ou bien t’étendre au-delà des frontières ?

Le foulard que je prône est le symbole de la femme africaine. Pour l’instant je me concentre sur Bruxelles, car Paris par exemple est une si grande ville que je n’arrive pas à voir l’impact que mon mouvement pourrait avoir. Par contre, ici à Bruxelles, il ne se passe pas une journée sans que je ne croise une nana qui porte un foulard de mes ateliers.

Par contre j’aimerais beaucoup aller en Afrique, car tous mes foulards proviennent de là-bas et cela me permettrait de participer à l’économie de mon pays.

Pourquoi est-ce que tu considères que le foulard est représentatif de la beauté féminine ?

Une fois que tu noues un foulard, tout ton visage est dévoilé. Dégagée de toute chevelure, on voit la véritable beauté de la femme. De plus, avec un foulard, inconsciemment, les femmes se tiennent très droite un peu comme une « reine » on va dire. Cette posture est pour moi très « royale ». C’est pour toutes ces raisons que je considère que cet accessoire met en valeur la beauté de la femme. Avec le foulard, toutes les femmes sont mises sur un même pied d’égalité.

Quel message adresserais-tu aux femmes qui liront cet article ?

J’aimerais dire aux femmes qu’elles sont belles comme elles sont. En aucun cas, elles n’ont pas besoin de l’approbation sociale pour définir leur beauté. Il faut tout simplement croire en soi. Et n’hésitez pas à « osez le foulard » pour révéler la reine qui est en vous (rires).

Propos recueillis par Bahija ABBOUZ